C'était en 2003.
Las Terrenas fut un vert paradis pour les babas cools européens dans les héroïques années 80. Une découverte fulgurante disent les "anciens" dont je ferai la connaissance. Un village de pêcheurs sans électricité (qui n'arrivera qu'en 1996), un Eden en bord de mer, pêches miraculeuses sur des plages de début du monde. Derrière le bourg, tout de suite, les "lomas", les mornes dans les Antilles françaises, les collines abruptes, à la végétation luxuriante, qui tombent dans la mer. La route goudronnée s'arrêtait alors à des kilomètres du but, il fallait finir par des pistes.
Pendant des années, les Européens affluent vers ce petit bout de bonheur sauvage dont le nom se murmure de bouches à oreilles. Les baleines à bosse viennent y frayer entre février et avril et c'est un spectacle grandiose.Voir votre Guide du Routard ou votre Lonely Planet favori...
Quand j'y arrive, la ville compte déjà plus de 10 000 habitants et la colonie européenne est nombreuse, plusieurs centaines de personnes. Française, majoritairement, mais aussi allemande, suisse, italienne... Toute une activité touristique s'est développée à la vitesse grand V. Les hôtels, maisons d'hôtes, locations et restaurants, échoppes, officines de locations de véhicules, circuits organisés fourmillent. Mais ce n'est pas le tourisme de masse des plages de Punta Cana, bordées de "tout-compris" où les européens viennent 8 jours se gaver de nourritures et d'alcools importés en dansant une danse des canards entrecoupée de rythmes locaux, entre deux coups de soleil vanille/fraise. C'est un tourisme plus discret, mais galopant. Les étrangers se sont organisé et c'est ainsi que mon amie a atterri à l'école française, une association de parents d'élèves, qui ont inscrit leurs enfants au CNED, et qui, de fil en aiguille, ont fini par organiser une vraie petite école privée, qui permet aux enfants de suivre une scolarité primaire et de début de collège et d'aller ensuite en pensionnat au lycée français de Santo-Domingo, de passer le bac et d'aller étudier en France.
Voila pour le contexte.
Pour l'heure j'arrive. Mon amie m'accueille. Mais très vite, je la trouve grognon, pénible. Elle est toujours fatiguée, elle râle, rien ne va...L'école où elle enseigne, la nourriture, l'approvisionnement en produits de base, no hay, la chaleur, les dominicains dragueurs et nonchalants, les cucarachas, énormes et noirs cafards véloces dont elle peine à se débarrasser ... Elle a hâte de rentrer et se demande ce qu'elle fait ici. Je suis déçue. Je suis venue recharger mes batteries, réfléchir à ma situation, rêver, nager, bronzer. Je ne peux pas me charger de ses soucis. Je n'en ai pas envie. Nos rythmes diffèrent. Je me retrouve assez vite seule dans cet eden familier et étranger à la fois.
J'occupe une jolie petite chambre dans un bungalow, au bout d'une allée bordée de végétation. L'hôtel est presque vide. Le matin, on me sert un petit-déjeuner de rêve avec des salades de fruits enivrantes de parfums subtils. Je papote avec la taulière, qui a investit ici toutes ses économies et les temps sont durs ma bonne dame! Je souris à la femme de ménage. Je hèle un moto-concho (moto-taxi) qui, pour quelques pesos, me dépose où bon me semble. J'aime tout particulièrement le cimetière au bord de l'eau, incroyable bric à brac de coquillages, de fresques colorées rongées par la mer, de fleurs, de vieilles dalles en ciment gris...
Loin des images de paradis touristique, la grand'rue "Calle Principal" est dès l'aube encombrée d'une circulation infernale, les motos sur lesquelles sont juchées 2, 3, parfois 4 personnes, les camionnettes, les triporteurs, des pick-ups, d'antiques bagnoles rouillées, des 4X4 rutilants, des quads... C'est la seule artère goudronnée. Tout le reste sont des pistes en terre battue. L'atmosphère est grise de pots d'échappement mal réglés, ça pue. C'est drôle.
Les échoppes du cru sont pleines de produits pour se blanchir la peau et les femmes se promènent toute la journée avec d'invraisemblables rouleaux sur la tête pour se lisser les cheveux et être belles le samedi soir, quand la bachata se déchaîne et que le Brugal, rhum local, coule à flot. Je musarde à mon rythme. Dans la Calle Carmen, les haïtiens, damnés de cette terre, exposent à ciel ouvert des peintures naïves...
Le soir, au restau ou dans les bars de bord de plage où je traine ma camarade, je fais connaissance avec quelques spécimens de la communauté française. Ils sont bavards et bruyants, ont le verbe haut et le gosier en pente. La bière et les cocktails circulent. Ils sont presque tous commerçants, assez méprisants pour la population locale, mais souvent drôles voire cyniques. Ambiance coloniale à tous les étages. Je bois, je danse... Ce ne sont pas mes Antilles, c'en sont d'autres, mais je reconnais les odeurs, la mer, la lune et les mille bruits de la nuit. Je flâne, je prends mon temps, je nage, et je ne sais pas alors que dans la petite ville, tout se sait, et que je suis vite repérée comme la touriste solitaire, la française
Entre le Brésil de R. et ta République Dominicaine, on voyage, on rêve, on vibre…
RépondreSupprimerAlors vivement la suite !
Zut cui m a devancé :p
RépondreSupprimerC' est étonnant ces gens qui voyagent mais refusent tout risque. Toute découverte ... Pourtant il suffit juste de prendre un petit chemin de traverse ...
J' espère que je les trouverais quand je partirais vers tes Antilles bientôt....
Pourquoi naïve au fait ?
Aaaaaah, l'ambiance coloniale. Je me souviens d'un voyage au Sénégal où ça m'avait franchement pesé ! Hâte de lire la suite... :o)
RépondreSupprimerLes expats sont souvent insupportables en effet... Mauvaises expériences au Cambodge et ailleurs...
SupprimerSuspense... suspense... :)
RépondreSupprimer(flânerie et découverte très agréable à suivre)
@tous : Ca vient, mais j'ai un peu de mal à cerner le sujet! Ca se complique... Forcément...
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