mercredi 30 décembre 2015

Blanche Neige

Elle ressemble à Blanche Neige. Brune, le teint pâle, les yeux clairs... Peut-être que sa bouche n'est pas assez rouge. Sa mère ne s'est pas piqué le doigt et son sang n'a pas perlé quand elle l'attendait, elle, l'aînée.
Elle est là, chez moi, avec sa petite tribu. Tout le monde est sage comme une image. La grande roue tourne et la colline de la Bonne Mère s'illumine dans le crépuscule hivernal. Contre le bleu, il y a une photo. Elle s'en approche, la regarde attentivement. Elle me demande : "Quel est le photographe qui a pris ce cliché?".
Je ne sais pas. La photo est en noir et blanc. Le tirage est légèrement sépia. C'est une vieille dame aux traits fins. Elle a du être très belle. Son profil est altier. Elle est coiffée, deux pinces retiennent ses cheveux, elle est fardée, un long trait d'eye-liner souligne sa paupière et son sourcil est dessiné au crayon sur son front. Elle a du rouge à lèvres. Elle porte de grandes et lourdes boucles d'oreille et un pull chiné. Elle a des bagues. Elle est assise à la table d'un café, contre la vitrine et d'une main soulève la tasse qu'elle va porter à ses lèvres. Sur la table ronde, des lunettes, un verre d'eau, des petites serviettes en papier sur un présentoir, comme en Italie, et un gros cendrier de verre, vide, une plaquette de pilules, un pot de sucre. Derrière elle, sur une table jumelle, un homme chauve a chaussé ses lunettes et, accoudé, lit un livre. Dehors, une silhouette et une bouche de métro.
Cette vieille dame, je l'ai trouvée il y a longtemps déjà à Buenos Aires. Au crayon sur la marie-louise, il y a écrit "Bares de Buenos Aires"... je l'ai aimée tout de suite, parce que les bars de Buenos Aires sont comme ça, toute la vie de la ville s'y vit aux vitres, sur les tables, avec les syphons de verre bleu qui font de l'eau piquante. Elle m'a émue tout de suite cette dame. C'est son visage, l'expression de son visage, qui fait le prix de cette photo que j'aime tant.
Son regard est perdu dans la rue, un peu grave, mélancolique, ou bien tout simplement, elle ne pense à rien, comme cela nous arrive quand, le regard lointain, on boit un café. Elle rêve peut-être à ce dernier tango hier soir, à la milonga où elle va souvent... On peut mettre ce qu'on veut dans ce regard, suivant l'humeur. En tous les cas, elle est seule et je me projette déjà dans cette photo... Mais pour l'instant, la vie me sourit. Blanche Neige est là.

lundi 28 septembre 2015

Et toi ? Qu'as-tu fait de ton été ? (3). Libertine. Vraiment ?

Wikipédia :
Le terme libertin (du latin libertinus, « esclave qui vient d’être libéré », « affranchi ») comporte deux acceptions principales :
Dans sa version d’origine, le libertin est celui qui remet en cause les dogmes établis, c’est un libre penseur (ou libertin d’esprit) dans la mesure où il est affranchi, en particulier, de la métaphysique et de l’éthique religieuse (exemple : Dom Juan de Molière).
Le sens qui prévaut de nos jours se réfère au libertin de mœurs, c’est-à-dire celui qui s’adonne aux plaisirs charnels (voire à la sexualité de groupe) avec une liberté qui dépasse les limites de la morale conventionnelle.

Je les ai rejoints tous les deux. Depuis ces jours là, je l'avais revu lui, une fois, dans les doux frimas de novembre sur la Côte d'Azur et elle pas du tout. Malgré l'envie que nous en avions, malgré quelques promesses et autant de tentatives, le temps, la distance, la vie quotidienne, les chemins caillouteux nous en avaient empêché.
Je les ai rejoints il y a déjà presque longtemps, pour 24 heures de soleil, de douceur, de rires et de sourires, de larmes furtives, de draps blancs et doux, de mer, de routes bordées de platanes, de poissons grillés et de vins légers, de confidences devinées, de caresses et de peaux, de sexes qui se frôlent et se rejoignent.
Avec eux, tu vois, je libertine de moeurs, mais aussi d'esprit. Nous libertinons de liberté dans une jolie relation à trois, rare et précieuse. Nous libertinons de paroles et de gestes. Nous libertinons le jour, la nuit, et aussi le matin.

Eux libertinent résolument, goulûment parfois. Ils font ce que font les libertins modernes, ils vont dans des lieux où ça se fait, et puis sur le net prennent des rendez-vous. J'ai fait ça moi aussi.
Ce soir-là, nous sommes cinq autour de la table,  2+2+1. Je crois que j'aurais eu envie qu'on ne soit que 3, 2+1, ou 1+1+1 ou 1+2.
Mais c'est gai, il y a un jeune serveur maladroit, une petite fraîcheur dans la cour, les deux filles découvrent qu'elles sont allé au même lycée pour jeunes filles catholiques et les garçons qu'ils ont fréquenté les Jez. Moi, j'étais dans le public, élevée par des hussards rouges post-soixante-huitards. Serait-ce moi la vraie libertine, "affranchie de la métaphysique et de l'éthique religieuse" ?

Ce couple de hasard est sympathique, mais je n'ai aucune envie de mélanger mes fluides aux leurs... Je préfère aller danser, seule. J'adore danser seule. Je m'esquive courtoisement lors de la petite promenade boisée qui suit le repas et les laisse alors que ma belle se penche doucement vers son ciel...

Plus tard, au chaud dans la grande chambre blanche, nous libertinerons avec nos corps et nos âmes. Parce que ce sont eux et parce que c'est moi. 



mercredi 2 septembre 2015

Et toi ? Que fais-tu de ton été ? (2)

Demain, c'est septembre. Demain c'est la rentrée. Les orages ont déjà éclaté, la semaine dernière la coulée de boue a bloqué la ligne de chemin de fer. Mais c'était hier. Comme un  avertissement de l'automne à venir.
Pour l'heure, le soleil est revenu. La circulation est dense en tous sens. C'est le dernier week-end des vacances. La longue voiture un peu vintage a gardé la forme carrée des voitures que nous dessinions quand nous étions petits. Elle n'a pas la clim et il fait chaud. La route est longue. On quitte l'autoroute côtière bondée et on remonte doucement la vallée de l'Orb. La circulation s'éclaircit et l'architecture vieillit. Les verts resplendissants, lavés par la pluie, des bois et des vignes, des restanques et de la vallée, des collines, le jaune des foins coupés et des murs, et les tuiles roses et ocres. La petite chapelle sonne la demie-heure cristalline.

On arrive enfin au rond-point du rendez-vous. Comme convenu, un coup de fil, et elle vient nous chercher car elle n'avait pas le droit de nous donner l'adresse exacte de notre destination. On vient, mais nous ne connaissons pas les organisateurs et si l'invitation a été lancée sur Internet, il faut un peu montrer patte blanche.
Ca fait bien deux mois qu'on s'est inscrit pour ce week-end "cordial"... Et nous allons chez des personnes qui mettent leur maison et leur propriété à disposition, sans doute devrais-je dire au service, de leur passion. Car nous allons à une rencontre de Cordes. De Shibari. De Kinbaku, cet art des cordes qui nous vient du Japon et qui se développe sous nos cieux...
Je n'y connais rien ou pas grand chose...J'ai eu une mauvaise expérience il y a quelques années. Encordée, puis plantée là, immobilisée, un grand vent de panique, d'étouffement, de claustrophobie. Ca n'avait pas duré, mais le souvenir est resté vif.

Dans le grand pré, il y a déjà du monde, les tentes sont plantées, nous, on a transformé le break en modeste camping-car, un matelas posé à l'arrière.
Notre délicieuse et rieuse organisatrice nous fait faire le tour du propriétaire, la petite cuisine d'été commune, la piscine, les arbres, l'ombre et le soleil de ce splendide après-midi, en face, la vallée, les collines, au loin la falaise rouge. C'est paisible et beau. Et puis surtout, elle nous présente aux personnes présentes. Il ne manque plus qu'un couple d'amis que nous connaissons bien et un retardataire, croisé sur le Net, et que je me réjouis de rencontrer. Il arrivera pour l'apéro.

Une dame est encordée sur un grand plaid. Son compagnon a l'accent chantant du Sud-Ouest. D'autres viennent d'Auvergne, de Belgique... Cette réunion est européenne! Nous devrions être presque 30... Sourires échangés, on sort notre caisse de Bordeaux, nos melons et nos tartes maison. On s'installe tranquillement dans cette atmosphère amicale. Sur le pré, quelques structures, solides montants pour faire des suspensions.
Ca discute ferme sur les techniques, la solidité, la qualité des cordes, leurs longueurs, leurs matières, chanvre, jute, coton, synthétique... Ca discute fouets, martinets, cat'o nine tails... Je m'essaye à manier un magnifique objet, lourd, souple, dangereux, mystérieux... Celui auquel il appartient est un maitre du genre. J'ai bien observé ses deux bras, ses deux mains occupées par le cuir,  faire des huit réguliers qui sifflent à peine. C'est très beau. Mes poignets et les muscles de mes avants-bras ne suivent pas... c'est difficile. Je suis aussi maladroite qu'un jeune enfant qui essaie de faire rentrer des triangles dans des ronds. Je tends mes fesses et la sensation est magnifique.
En couple, les uns encordent et les autres sont encordées. On regarde, on apprend. Ca "travaille"...

Le ciel passe au bleu foncé, profond, la pleine lune se lève sur nos libations, nos discussions, nos plaisanteries. Nous nous sentons bien lui et moi. Vraiment bien. Nos hôtes sont généreux de nous offrir ainsi l'occasion de partager tout cela. Et les gens sont juste là, sans frime, sans tralala, chacun s'habille comme il l'entend, short et tongs ou tenue fétish, ce grand jeune homme aux cheveux longs, silhouette longiligne en corset et en jupe, hautes bottes sur ses jambes fines. Notre organisatrice en est à sa troisième tenue. Elle a fini par opter pour du vinyle. Je mets ma petite robe noire, tandis que Fifi est nu, piercings et chaînes, au bout de la laisse virtuelle de sa maîtresse. Et c'est bien comme ça. C'est juste comme on veut. C'est fraternel en quelque sorte. Un endroit sans jugement.
Plus tard dans la nuit, les jeux reprennent et se poursuivent. J'aide un peu Salomé de mes mains et de mes petites griffes sur son homme. Complices... Je ne sais plus qui au matin, inventera un joli mot, repris plus tard... Ca a "claqueté" dans la nuit sur son cul...
Sagement vers minuit, la fraîcheur et l'humidité aidant, tout le monde se retire, sauf deux qui, sur une grande couverture à la belle étoile, parlent, parlent, parlent et s'endormiront, nous l'apprendrons, dehors, vers 5h, presque aux premières lueurs du jour...

Le lendemain, amour fait au petit matin, le break est sous un grand figuier lourd de fruits, café passé, tête encore dans les étoiles, je vais me faire encorder à mon tour. D'abord par François, une sorte de sommité dans le genre tu vois... Il m'attrape et hop! en 5', me voila immobile, jambes à moitié pliées, yeux grand ouverts, sur la pointe de mes orteils, suspendue au soleil. C'est un petit échauffement me dit-il. C'est bien. C'est amical et je n'ai pas peur. Attention, me dit-il en me détachant. Je suis tout sourire... Tu vas y prendre goût!
A la piscine, il encorde sa compagne et une autre, et une autre et les jette dans l'eau... Tout est safe, il y a du monde pour parer si jamais... C'est assez ludique, mais quand même, jetée à l'eau entravée... Je n'y suis pas encore...

Vient le moment, enfin, où Morphée me prend dans ses bras... Morphée, c'est son nom. Une amie commune nous avait avertis l'un de l'autre. Si Morphée est là, m'avait-elle dit, tu renoueras avec les cordes. Nous avons parlé la veille. Elle lui avait aussi parlé de moi. C'est un homme jeune, beau, mince, presque gracile, calme et tranquille, souriant. Il est là avec sa compagne, la belle et rauque Insolence.
Assise en tailleur, il me bande les yeux. Tous ses gestes sont empreints d'une grande douceur et d'une grande fermeté. Jusque là, j'étais observatrice. C'est à mon tour d'être impliquée. Il va prendre son temps, être avec moi tout le temps, dans le calme et le silence chuchoté de cet endroit intime et ombragé.
Les bras derrière le dos, il m'indique comment mettre mes mains.
Tu ne dois jamais sentir que tes pouces s'endorment et si tu as des fourmis, dis-le tout de suite. Bouge tes doigts de temps en temps et vérifie. Ne jamais oublier que ce sont des jeux dangereux. Qui ont pu être mortels ailleurs en d'autres temps. Cet autre ami présent nous racontera comment sa compagne s'était évanouie pour des cordes qui compressaient son plexus, entre les mains d'un homme inexpérimenté. Il faut apprendre et apprendre encore, ne pas brûler les étapes.

Les cordes douces glissent sur moi. Le buste d'abord, puis les jambes, chaque orteil est enserré. Petit à petit, ça serre. Ligotée. Doucement, je sens mes fesses qui décollent du sol. Doucement mes jambes sont soulevées. Pliée en deux, puis déployée. Ma tête bascule vers le bas. Interloquée, enveloppée, enserrée, je me balance. Ca tourne. Je lui demande de ne pas me faire tourner, je n'aime pas ça, ça me donne la nausée. Il est là. Je ne tourne plus. Ca ne tourne plus. Je lâche les muscles de mon cou. je laisse aller ma tête et ce n'est pas que physique. Je laisse aller. J'écoute. On parle tout bas. Je le sens qui est là. Attentif mille fois.
Tout aussi doucement que j'ai été soulevée, je sens le sol me rejoindre. La tête me tourne. C'est très déroutant. Je suis assise. Il est derrière moi, je me blottis dans ses bras. Il me dénoue. Les cordes douces glissent encore sur ma peau, sur mes cuisses, sur mes seins.Mon foulard tombe mais je garde les yeux fermés. Je m'allonge. La tête posée sur ses genoux, les sanglots montent. Je pleure, je pleure.

Un peu plus tard, je l'observerai, lui et Insolence, dans un jeu où ils seront si proches, une suspension dure, tendre et érotique... C'était très beau et très intime. Je ne me suis pas sentie voyeuse. Nous avons simplement partagé ce moment.

Et puis le week-end s'achèvera avec un sublime carrot cake, du saucisson et de la bière belge...
Le chemin du retour, dans la douceur de la nuit tombée, fut presque court...
Je ne sais pas si vous lirez ce texte, mais... Merci à tous!


                                                        (photo contractuelle)

lundi 10 août 2015

Et toi ? Que fais-tu de ton été ?

Cette petite question innocente que me pose une amie dans un mail résonne depuis quelques jours...

Certains envoient des cartes postales du front (les veinards), d'autres profitent des chaleurs pour avoir encore un peu plus chaud... Il y a celles qui se perdent dans le métro, pendant que d'autres se perdent dans la fraîcheur de rivières secrètes... Il y en a qui se mettent à l'aise et d'autres qui optent pour des positions assez inconfortables.

Et toi ? Que fais-tu de ton été ?
Le temps s'écoule tranquillement, la chaleur étouffe un peu les velléités d'action. Il faut dire que j'ai chaud depuis assez longtemps maintenant. Depuis mai, depuis mon voyage lointain, et en dehors d'un bref et frais épisode parisien - où trouver refuge dans une brasserie en compagnie d'une andouillette/frites/bière m'a réchauffée et réconciliée avec la vie - je vis à 35°. Le coeur du mois d'août est propice à une certaine langueur.
Je surfe aussi beaucoup sur Internet.

Alors, je vous fais deux petits cadeaux classieux. Deux documentaires assez  formidables je trouve.
D'abord, celui d'Ovidie dont je suis le blog régulièrement. Ca s'appelle "A quoi rêvent les jeunes filles ? ".

Chers lecteurs et lectrices quadras, quinquas, plus jeunes, plus vieux, parents, grand-parents de jeunes filles en fleur, de jeunes gens accros aux jeux vidéo, prenez une heure ou deux pour partir à la recherche des innocences perdues... Pour le meilleur ou pour le pire ? "On se conforme à des normes..." dit une des jeunes femmes interviewées. En doutions-nous ?



Et puis pour faire bonne mesure (je n'ose dire pour faire pendant...)  un documentaire de l'excellent Serge Moatti   : "Mes questions sur le désir masculin"... Je dois à l'honnêteté de préciser que j'ai trouvé ce deuxième film parmi les commentaires d'un des posts d'Ovidie.


 Bonnes vacances!

vendredi 3 juillet 2015

Là-bas.

Partie loin.
Partie respirer l'air d'une autre partie du monde. Bus, avions, villes, villages, plages, rencontres
Vu des riches et des pauvres, des singes, orang-outans, macaques voleurs et paisibles nasiques à la culotte blanche, un crocodile et des serpents, des poissons chamarrés et des tortues gracieuses, des bivalves multicolores et craintives, des lézards géants, des plages des débuts du monde, des arbres millénaires, des buildings rutilants, hauts, hauts et des cases dans la boue, des chinois et des hindous, des musulmans et des bouddhistes, des enfants qui jouent sous la gouttière de la pluie équatoriale et des pêcheurs qui vendent leurs poissons au cul des bateaux peints pour la fête, des voyageurs et des paumés, des solitaires et des groupés.
Des petits bateaux jaunes, bleus, rouges, qui traversent la rivière, mouvement perpétuel, il n'y a pas de pont dans la ville. 
La soie, le coton, l'or et l'argent, le cuir, le bois.
Les temples et les mosquées. L'encens et le piment.
Le laksa, les pupias, le nasi lemak, le bubur ayam et les roti chanaï.
Les appels du muezzin et la bière bue en cachette. 
Les journaux en plusieurs langues.
Les paroles en plusieurs langues. 
La mer trop chaude, les fleuves boueux.
La buée sur mes lunettes dans la jungle.
Le plastique, partout le plastique.
Les bagnoles, partout les bagnoles.
Les motos, les scooters, partout. 
Mac Do et KFC partout. 
Les plantations de thé, collines rayées de vert, moutonnement infini.
Les palmiers à huile, partout les palmiers à huile, bien rangés dans leurs allées tracées droit à la place de la forêt.
La culture sous serres, la laideur des villes, des immeubles rongés par l'humidité.
La publicité. Partout la publicité.
Le bus qui va à Ikéa. C'est écrit dessus, au milieu des autres destinations. 
Les hommes des campagnes en sarong. Les hommes des villes en jean. Celles qui se baignent tout habillées et celles qui portent des mini-jupes.
Les smartphones. Partout les smartphones. Une envolée de jeunes filles coquettes et maquillées, foulard artistement décoré de barrettes en strass, jeans moulants, se poussant du coude en riant, les deux pouces sur l'écran. Une vieille dame assise en tailleur au milieu de son étal de poissons séchés au marché qui consulte son écran. Un homme en sarong, sur sa mobylette qui fume d'une main et téléphone de l'autre.
Orang, ça veut dire homme, être humain. Orang-outan, ça veut dire "homme de la forêt". Nous partageons 97% de notre ADN avec eux.  Ils sont mal en point.
Je crois qu'on partage 100% de notre ADN avec les macaques. Invasifs, quémandeurs, agressifs, voleurs, rusés... Il semblerait même que certains se soient pris en selfie. C'est dire!


jeudi 25 juin 2015

Backpackers

Simon et Timo
Ils ont 20 ans. Ils sont allemands. Nous nous sommes croisés à plusieurs reprises dans les bus et les guest-houses, à Penang, aux Cameron Highlands, aux îles Perhentian... Ils ont l'âge de ma fille et sont adorables. Ils ont pris une année sabbatique entre le Gymnasium et la fac où ils vont faire de belles études d'ingénieur. Ils ont travaillé en Australie quelques mois et parcourent l'Asie avant de sagement rentrer au pays. A Kuala Lumpur, je tombe sur eux en allant fumer une clope sur le toit terrasse de l'hôtel. Nous rions de nous retrouver. Ils m'emmènent boire un verre à l'Héli Bar, cosy et branché au 35ème étage d'un immeuble d'où nous regardons la nuit tomber sur la grande ville, l'incroyable skyline se fondre dans le coucher rouge du soleil, les immenses tours Petronas s'illuminer de blanc, la tour Menara devenir bleue...

Dieter.
Dieter est allemand. Il a eu 63 ans. Nous les avons fêté chez Zeck, à Kota Bahru, dans la petite guest-house  au confort sommaire, mais chaleureuse et conviviale. Ambiance pension de famille. Zeck et sa femme Mariam ont cuisiné un repas de poissons au curry et un gros gâteau crémeux a été acheté. Bougies soufflées. Petits cadeaux.  Zeck's Travellers Inn est un de ses points de chute. Il a quitté l'Europe il y a au moins 40  ans. Il a vécu en Australie 17 ans. Il a parcouru toute l'Asie, du Vietnam à la Thaïlande, de l'Inde aux Philippines, de l'Indonésie au Laos... Il ne peut plus revenir. Il ne veut plus. Il est drôle et désenchanté. De quoi vit-il ? Il va de dortoir en dortoir, de riz sauté en poulet frit, de mangues juteuses en banane plantain. Il a des enfants ? Une fille peut-être. Il l'a appris il y a quatre ans. "C'est trop tard" me dit-il. Il est charmant, attentif, me donne quelques conseils de bon sens. Il a vu ce que l'on ne voit plus. C'est un ancien hippie à l'allure désormais ordinaire d'un homme de son âge. Ni beau, ni laid, ni romantique, ni baroudeur. Discret puits de science. Il continuera à errer longtemps.

Stéphanie.
En allant étendre mon linge sur les fils tendus entre les cocotiers derrière la maison de la plage, j'avise un sac à dos posé là, au pied de l'arbre. Le lendemain, il est toujours là. Tiens ?! Je vais voir la jeune femme de la réception. "Heu... Il y a un sac à dos au pied de l'arbre...?". "Ah. Oui. Elle dort dans son hamac." Comme une sorte d'évidence. Stéphanie a 28 ans. Elle est belge. Elle est en route depuis dix ans. Elle parle français, anglais, espagnol, allemand, flamand. Quand l'argent est court, elle rentre en Europe et fait les saisons touristiques. Puis elle repart. Elle va rentrer bientôt vendre des fringues et des colifichets sur les plages à la mode de Sicile. Ca rapporte me dit-elle. Elle vient de voyager 5 mois avec un budget de 500€ par mois environ. Un peu moins, car elle a du prendre des avions, et son pécule a fondu. Elle négocie, quand elle peut, d'accrocher son hamac dehors et d'avoir l'accès aux sanitaires. 10 Ringgits (RYM) par jour : 2,50 €... Elle vient de faire un chantier bénévole de reconstruction de maisons aux Philippines, toujours sous le coup du gigantesque typhon Haiyan qui a détruit une grande partie du pays il y a deux ans et demi.
Un soir, un groupe de Malaisiens en vacances là ont hurlé jusqu'à 1 heure du matin autour d'un karaoké. Ils riaient très fort et chantaient très faux. A 3 mètres des baffles saturées, Stéphanie dormait paisiblement dans son hamac. 
"Dès que le vent soufflera, je repartira"...

Mosché
Il est israélien. Grand, les yeux bleus, très bronzé, très ridé. Il n'a pas loin de 70 ans. Informaticien à Silicon Valley, il a tout envoyé balader il y a presque 20 ans. Il chante Bob Dylan et Simon et Garfunkel sur une guitare désaccordée. Il vit en Thaïlande, marié à une Thaïlandaise. Il ne sait pas si c'est bien. Si ça lui plait au bout du compte... Il en marre de bouffer du riz. Mais c'est comme ça. Il me semble que l'acuité de son cerveau a été quelque peu ramollie par l'atmosphère tropicale.
La Thaïlande a une politique mouvante et corrompue en matière d'accord de visas. Il passe donc la frontière régulièrement pour faire tamponner son passeport, de 3 mois en 3 mois...

Martine
Retraitée de l'administration française (ministère des finances), Martine a fait du Vietnam son camp de base il y a quatre ans. La photographie est sa passion.
Un bob délavé sur la tête, elle arpente l'Asie en solitaire avec son ordinateur et son Nikon. Elle fait des photos extraordinaires. Elle est allé en Chine quatre ou cinq fois déjà, pendant plusieurs semaines dans des provinces perdues où elle était la seule étrangère. Elle choisissait de dormir dans les dortoirs de filles, où elle était presque sûre de tomber sur quelqu'un qui possédait peut-être quelques mots d'anglais, langue qu'elle parle elle-même fort mal, avec un accent français très drôle, mais avec entrain. Du papier, un dessin, quelques mots, ses compagnes de chambre lui traduisaient en idéogrammes ce qu'elle montrait ensuite alentour pour trouver son chemin, prendre un bus, trouver un hébergement, manger...
Portraits magnifiques, rues des villes, paysages à couper le souffle... Elle peut se lever à quatre heures du matin pour aller prendre dans l'aube éblouissante les travailleurs des marais salants du Vietnam, les paysans du Kérala, le berger dansant des chèvres du Yunan, les laboureurs qui mènent leurs buffles, les rizières, les maisons villageoises, les mamans et leurs enfants rieurs, les fleurs et les insectes, les pêcheurs qui jouent au foot sur la plage après leur dure journée de travail au crépuscule de la Mer de Chine, dans leurs ombres et dans leurs lumières...

Francis
Francis est français. A 41 ans, c'est un beau gosse bronzé aux tempes légèrement grisonnantes. Il est trader. Mis à la porte d'une filiale de la Société Générale en 2008 lors de la grande crise bancaire, après un petit tour à Pôle Emploi et quelques propositions risibles de jobs stupides, il a décidé de reprendre du métier à son compte. Il est parti il y a plus de 3 ans et travaille avec son ordinateur... Il trade en sac à dos, de n'importe où en Asie. Il gagne bien sa vie et met de l'argent de côté. Rien ne l'étonne. Il est drôle et optimiste sur le monde tel qu'il va. Il dit qu'il va rentrer d'ici 3 ou 4 mois... Nous partageons un chicken rice et un thé brûlant sur une toile cirée qui colle sous le ventilateur asthmatique et puis il part à gauche, tandis que je vais à droite.

mardi 2 juin 2015

Un drôle de pistolet

Elle est très jolie. Je le savais déjà. Elle est élégante. Tout le temps. Malgré la chaleur. Peut-être à cause de la chaleur. Ne pas laisser aller. Elle n'est pas très grande, mince et gracieuse et coloriée de robes bleues, de sarouels verts, de jupes longues et rouges, de boucles d'oreilles et de sandales... Ses armoires sont pleines de trésors ramenés d'un peu partout. Elle m'a nippée.
Elle a voyagé. Beaucoup. Souvent. Il y a longtemps qu'elle est partie. Probablement définitivement. Mais avant cela, bien avant, elle partait déjà. Vers l'Est toujours. Son passeport est couvert de tampons, de visas, d'autorisations multicolores écrits en mille caractères inconnus. Chaque page en est pleine. D'ailleurs, elle a failli ne plus avoir de passeport, car il n'y avait plus de place. Notre administration, dans sa grande mansuétude, lui en a accordé un "grand voyageur". 60 pages à remplir... D'ici 2019, je crois qu'elle va y arriver...
Elle est solitaire aussi. Il y a quelque chose là, pas loin, d'irrésistiblement solitaire. C'est une terrestre qui m'évoque un marin. Elle a posé son sac mais peut-être qu'un jour elle repartira.
Elle est bavarde, généreuse, ouverte au monde et n'a aucun sens de l'orientation. Les choses lui échappent.
C'est sans doute pour ça qu'elle ne va pas sur la  mer. Mais dessous.
Elle écrit. Tout le temps, partout, d'immenses cahiers de voyages, des histoires pour les enfants, des nouvelles d'elle et des autres, un  très beau livre, un autre en projet. Elle peut plonger des mois dans l'écriture, sans lever le nez, assise n'importe comment sur ses coussins, juste manger un peu et dormir. Elle plonge. C'est pareil, plonger et écrire. Etre là et être ailleurs. Dans une bulle d'oxygène vitale.
Elle a des souvenirs entassés dans des caisses. Des souvenirs entassés dans sa mémoire trop vive.
Elle aime. Elle a aimé. Beaucoup. Un jour, elle est partie. Toujours.
Elle s'est battue. Elle ne lâche pas. L'écriture et le reste aussi.
Quand j'étais petite, ma grand-mère disait  "C'est un drôle de pistolet!", parlant d'une personne qui ne faisait rien comme tout le monde, qui était un peu marginale ou tout simplement surprenante...
Cette fille, c'est un drôle de pistolet. Parce que survivre deux mois seule en Chine, dans tout la Chine, avec un sac à dos, sans parler chinois et en confondant sa gauche et sa droite, je ne vois aucune autre explication...
 

vendredi 15 mai 2015

Téléphone

Tu vas partir. Bientôt. Très loin. A l'autre bout de la terre. A l'autre bout du monde.
Ce voyage, tu en as rêvé sans oser te l'avouer. Sans oser y penser vraiment. Et puis un jour de blues, un jour de vertige au bord du net, tu as une conversation avec l'être qui t'es le plus cher au monde, ta fille, grande petite de 22 ans, grande petite devenue presque adulte, grande petite qui te connait aussi bien, peut-être même mieux encore, que toi qui l'as mise au monde... Et elle te dit des choses et elle te dit "Va, ne te retourne pas...". Elle te dit que tu dois couper, tu dois partir, repartir comme tu as su le faire par le passé.
Tu ne dors pas. Tu penses à cette conversation. Tu as besoin d'un ailleurs pour penser les choses autrement.
Tu vérifies la date de validité de ton passeport, tu passes un mail, un seul, à ton amie si proche et si lointaine et ton amie te dit "Oui. Viens".
Alors tu vas partir.
L'amie te donne deux/trois conseils pour ton voyage.
Apporte si tu en as un, un vieux téléphone portable, on mettra une carte Sim locale dedans.
Tu ouvres tes tiroirs, tu cherches un peu et au milieu d'un fatras de fils que tu démêles et d'objets hétéroclites, de cartes postales, de trombones, de batteries, de piles hors d'usage, de badges de colloques, de ficelles et de rouleaux de scotch...  Tu retrouves ton increvable petit téléphone blanc, que tu as délaissé il y a quatre ans au profit d'un "objet intelligent" (comme si les autres étaient des "objets cons")...
Tu le recharges et comme R2D2, il s'allume... Il est là, sympa, discret et plein de ressources encore, prêt à servir à nouveau. 
Tu l'ouvres, tu appuies sur les touches et tu lis les noms sur ton ancien répertoire...
Et une grande tranche de ta vie passée te remonte en mémoire...
Qui c'était ce mec dont tu lis le prénom et le nom ? Ah! oui! Je sais. Et puis cette collègue (quelle faux-cul celle-là!), cet amant perdu de vue (et si je l'appelais ? il en ferait une tête!), ce p... de directeur de cabinet qui a eu ta peau, ce type sympa avec lequel tu allais boire une bière en terrasse sur la place aux platanes, à côté du manège, après le boulot, en parlant de tout, de rien...
Ta vie passée.
La nostalgie n'est plus ce qu'elle était.  


 

lundi 4 mai 2015

Mon légionnaire

Il est grand, il est blond, il a une sacrée gueule, taillée à la hache un peu tu vois ? Il est beau, d'une beauté singulière. Il est beau dedans aussi. D'une beauté singulière. Je crois qu'il a fait des trucs un peu insensés. Des trucs de légionnaire. Des trucs de matelot. Des trucs de mec qui en a. Il avait pas peur il m'a dit.
Notre rencontre est parfaitement improbable. Notre entente est parfaitement insolite.
Sa peau est contre la mienne, sa morsure répond à la mienne, son sexe est doux, si doux, ses cuisses sont lisses, des cuisses de fille.
Je le prends et il me prend. Je grimpe sur lui, je le griffe, il me cale, me maintient, il est fort, il me fait des bleus avec ses doigts durs qui écartent mes cuisses. Des bleus tendres. Il fait jaillir l'eau de mon corps. Je le goûte, lui, son odeur, sa peau, son cul, son sperme.
Il fume et boit trop de café. On parle, on parle, on parle. On est très loin et très proches. On rit. On sourit. On partage nos corps et nos mots et nos maux.
Je suis heureuse de t'avoir rencontré.



samedi 2 mai 2015

Open bar


       

 Alors voila. L'interdiction préfectorale n'est plus. Welcome back on board! 

dimanche 19 avril 2015

Les touffes de poil

Il n'allait pas bien. Il ne mangeait plus, se traînait l'oeil un peu vitreux, l'air malheureux. Sur la couette, j'avais trouvé une petite touffe de poils gris poisseuse de sang. Puis une autre sur le tapis. Des gouttes brunes dans le couloir. Il s'était blessé sous le menton, tombé sur un fil de fer ou un morceau de bois et avait gratté sa blessure jusqu'à l'os fin et blanc de sa petite mâchoire. Il grattait, grattait... Dépérissait. Je ne savais pas quoi faire.
J'ai gratté moi aussi. J'ai gratté ma blessure à peine cicatrisée. Et maintenant, ça brûle et je saigne et je gratte...
Un soir d'attente, un soir où tu sais qu'il ne faut pas, surtout pas. Un soir où tu es, tu sais que tu es fragile. Internet, quelques clics et tu trouves et tu vois. Il n'est pas besoin de l'inique et inutile loi que nous concocte ce gouvernement imbécile pour gratter, gratter jusqu'à l'os, la peau est si fine, la chair est si tendre. Et trouver. Internet est redoutable. Abyssal. Vertigineux.
J'avais commandé à la pharmacie un col, en forme d'entonnoir en plastique blanc pour empêcher que cela empire, l'empêcher de se gratter. Je n'en ai pas eu besoin. Il a cessé et petit à petit, la plaie s'est refermée, les poils ont repoussé et il n'y parait plus. Le chat est pleine forme. Il mange et il dort. Il court après les gabians et les tourterelles qui se posent sur la balustrade. Il pousse un petit cri rauque de joie lorsqu'ils s'envolent rejoindre d'autres maisons perchées. Et puis il mange et il  dort, tapi dans son recoin de placard en laissant ses poils gris sur les piles de draps.
Le temps est galant homme. Je n'utiliserai pas le grand col en plastique blanc. Ma peau va finir par repousser. Et je mangerai et dormirai en rêvant des gabians et des tourterelles.

jeudi 19 mars 2015

Bonjour chez vous!

Il fait un temps splendide après deux jours du retour de la pluie et du froid qui ont sapé mon énergie.
Je prends mon vélo et vais courir et m’aérer dans le plus grand parc urbain de Marseille, le parc Borelly, poumon vert délicieusement situé en bord de mer, un parc à l’ancienne, conçu à la fin du XIXème siècle, belles allées arborées, plan d’eau, buvette et barques, cascade en rocaille, jeux d’enfants, jardin exotique et vastes pelouses.
Face à moi,  le paysage est barré par les falaises calcaires du massif des calanques, bleutées d’une légère brume.
C’est calme, on est mercredi matin. Quelques joggers. Sont-ils tous enseignants, retraités, rentiers, en RTT,  ou comme moi riverains de la case de l’Oncle Pôle ? Des jeunes gens torses nus font des pompes et jouent à cochon pendu sur les agrès en ciment. Des grands-parents trottinent après  leurs tout-petits en vélo à quatre roues, des mômes font du  patin à roulettes, jouent, courent… Quelques mamans bavardent en baladant mollement  leurs poussettes. L’unique paon du parc pousse ses cris stridents et j’aide une petite fille à grimper sur le talus pour qu’elle l’aperçoive. Il est toujours au même endroit et de temps en temps, le dimanche, il fait la roue et les enfants poussent des Ho ! et des Ha !...  La roseraie est en travaux. Au loin, on aperçoit la tribune de l’hippodrome voisin. Une dizaine de personnes y observent une course de trotteurs. Une grosse ragondine prend le soleil avec son petit sur la pelouse et les cols-verts  et les cygnes pédalent paresseusement dans l’eau. Un groupe d’ados, tous élégamment de noir vêtus semble répéter une pièce de théâtre ou tourner une vidéo. Un monsieur bouquine sur un banc.  Une flottille de dériveurs et d’Optimists forme au loin des petites taches blanches sur la mer. Tout est si paisible…

D’où me vient le sentiment d’être Numéro Six ?



dimanche 15 mars 2015

A poil!

Une ancienne commentatrice de mon blog me contacte, il y a quelques mois.
Elle part bientôt faire un voyage à l’autre bout de la terre. Elle aime bien ce que j’écris, même si elle ne commente plus depuis un moment. Nous correspondons de loin en loin pendant quelques temps.  Je lui envoie mon journal de bord du voyage en question, puisque je suis allée dans ce pays il y a quelques années… Rien de publié ici, c’est d’autre chose qu’il s’agit.  
Elle part en voyage. Elle m’envoie un petit mot à son retour. Puis, il y a environ quinze jours ou trois semaines, elle m’apprend qu’elle va passer ici ce week-end. Elle sera chez un ami. Pendant toute notre correspondance, elle refuse de me donner son prénom. Son mail et ses anciens commentaires sont sous pseudonymes bien sûr. Pour ma part, je signe de mon (vrai) prénom. Je crois comprendre qu’elle a eu des prises de becs virtuelles avec une autre commentatrice… Je ne sais pas de quoi elle parle, je n’ai jamais – par chance peut-être - eu affaire à un troll ou une trollette, ni à un commentaire malveillant…  Mais elle est très chatouilleuse avec cette histoire… Je respecte son anonymat. Au fil des derniers mails échangés, sa signature en forme d’initiale devient presque un jeu.
Nous convenons de nous rencontrer à l’heure de l’apéro dans une brasserie bien connue de la ville. Elle m'a demandé auparavant si je veux bien rencontrer l’ami chez qui elle loge. Bien sûr, pas de problème. J’ai juste une description physique – essentiellement un manteau rouge -  et un numéro de téléphone. Je les retrouve tous les deux dans la rue et nous allons ensemble boire ce verre dans ce grand bar confortable que j’aime bien. On y sert de la Suze et de bonnes cacahuètes et les joueurs d’échecs occupent les tables du fond. Ce qui sont de vrais signes de civilisation...
La conversation s’engage, ce n’est pas désagréable, et voila qu’au fil de l’eau, elle me dit : « Au fait, j’ai fait lire ton blog à Bertrand!» (appelons-le Bertrand).
Je crois avoir mal compris... QUOI ? Cette nana qui habite loin (elle est suisse et il est probable que je ne la revoie jamais), de passage, qui m’a fait une pendule à propos de son prénom à cause de vieux posts anonymes échangés avec je ne sais qui, se PERMET sans vergogne de faire lire mon blog, intime, parfaitement personnel, anonyme sur la toile, à un mec qu’elle connait à peine ( ils se sont rencontrés très récemment), mais qui habite ici (à deux pas de chez moi, ironie...) et que je suis à même de croiser en ville car, sans nous être jamais rencontrés, nous fréquentons parfois les mêmes cercles…  
Je n’en crois pas mes oreilles. Hormis deux amis chers (vous vous reconnaitrez), PERSONNE dans ma vie ne sait pour ce blog. PERSONNE. Ce qui me permet évidemment d’écrire ce journal très  intime sans me censurer et d’avoir des correspondants anonymes, même si j’ai fait quelques belles rencontres dans la vraie vie avec d’autres blogueurs et blogueuses, mais sur un pied d’égalité, de complicité et de confiance réciproque qui ne s’est jamais démenti. Je ne connais pas ce Bertrand devant lequel je me retrouve à poil. Je me sens trahie, violée, vraiment. Je laisse éclater ma gêne et ma colère, mais le mal est fait. Il est prévu que nous sortions ensemble, justement dans un endroit que je fréquente depuis des années et où je connais la moitié des gens… La soirée se passe cordialement, je suis courtoise. Quand je rentre, il est tard et j’ai du mal à m’endormir.  
Je ne sais pas quoi faire. Fermer cet espace ? Le rendre privé ? Mais alors perdre une bonne partie de mes correspondants… ce blog est important pour moi. Je suis très en colère et dans le plus grand embarras. On ne m’y reprendra pas… En attendant, je fais quoi ? Je déteste cette situation. 

lundi 9 mars 2015

Visite

On a parlé d’Istanbul et de Berlin. De Buenos Aires aussi. On a parlé de l’Europe Centrale et de Prague. On a parlé d’elles, de toutes ces elles qui volètent autour de toi. On a parlé d’il, je t’ai ouvert mes placards. On a parlé des autres ils sur lesquels j’ai fait escale. Maintenant, je suis seule sur mon île perchée.
On a marché la nuit, un peu, le jour, beaucoup, on a bu, un peu trop, on a mangé, bien.
On a parlé, parlé, parlé. On s’est assis au bord de l’eau transparente.
On a rencontré une vieille dame à qui j’ai fait la bise. On a aussi appelé les pompiers.
On a parlé d’instruments de cuisine. De théâtre.
Je ne t’ai pas montré mes fuck-me-shoes. Je crois que tu en avais envie.

vendredi 30 janvier 2015

T'sé qu'elle en a chié elle aussi...

Pour toi chère R
Et pour nous toutes...
Et pour vous aussi les mecs, les hommes, les poilus, les imberbes, les sexys, les ronds pis les carrés, les autres...
Elle avait 70 ans Tina quand elle a chanté ça. On a de la marge...




mercredi 21 janvier 2015

Je vous aurai vraiment tout fait!

Oui, je sais. La période est rude, et vous ne l'avez pas mérité.
Oui. Je comprends.
Je suis désolée vraiment.
Mais c'est comme ça. 
Navrée de vous l'infliger.
Ca me passera avant que ça vous revienne, disait ma mère-grand.


En plus, le clip n'est pas bon.

mercredi 7 janvier 2015

Charlie

Quels mots ? Je ne sais pas... Quel monde ? Je ne sais pas... Qui ? Comment ? Et surtout, merde! Merde... MERDE! Quelle régression....
Ne pas se laisser gagner par la peur, la haine, le repli, la douleur, l'incompréhension, la stupeur, et puis la haine, le repli, l'intolérance... Et puis ne pas faire d'angélisme non plus. Quel merdier! 
Merci à eux tous. Faut qu'on continue. J'sais pas moi... On s'abonne ?