mercredi 27 août 2014

Ecrire ou faire l'amour

Ces derniers temps, cette fichue fracture m'a donné le sentiment que ma vie m'échappait.
Mon "mec" se fait la malle, le travail me fuit, ma cheville lâche...
Je suis seule dans la ville, dans la vie (en fait ce n'est pas vrai du tout) mais j'avais ce sentiment insupportable de solitude, de ne plus rien contrôler (et ça c'est en partie vrai). Que ma vie m'échappait.
Quand j'étais petite, vers 4 ou 5 ans, j'avais un livre illustré qui racontait l'histoire d'un petit bonhomme qui était une fleur de pissenlit, cette boule duveteuse sur laquelle on s'amuse à souffler... Il arrivait des tas d'aventures à ce petit bonhomme. Il était si léger qu'il se laissait porter par le vent et se retrouvait en fâcheuse posture. Un nouveau coup de vent le sortait de là et le portait ailleurs. Je me souviens de cette image du minuscule héros qui atterrissait sur une feuille emportée par les eaux de la rivière. Il regardait le paysage défiler sur son fragile radeau...
J'ai eu, ces semaines, l'impression d'être ce petit personnage, accrochée à ma feuille d'arbre au fil de l'eau.
J'ai eu l'impression d'être cette fleur sur laquelle on souffle et qui n'est plus rien. 

Et puis quelqu'un que j'aime et qui m'aime est venu, on a parlé, beaucoup, j'ai pleuré, beaucoup. Il s'est passé de belles choses. Elle m'a dit de belles choses et surtout, elle m'a écouté. 
J'ai arrêté de pleurer. Parce qu'en réalité, ça se voit pas sur le blog, mais ça fait 15 jours que je pleure pour tout, pour rien et que je me demande si je ne suis pas en train de virer dépressive. Mais en fait non.
Depuis ce passage dans ma maison, je vais mieux et je re-pense.
Je pense à mes héroïnes.
Consciemment ou pas, depuis qu'on est tout petit, on a des héros, des héroïnes qui nous fabriquent un imaginaire intime de ce que l'on voudrait être, sur notre façon d'être au monde et de le percevoir.
Personnages réels ou de romans, de films, pop stars, oncle lointain ou cousine extraordinaire dont la vie libre en rupture avec les codes nous a fait rêver adolescent(e) et puis la vie avançant, ce sont d'autres destins qui nous inspirent.
Mes héroïnes sont toutes des femmes.
La première fut sans doute vers l'âge de 11 ans, Scarlett O'Hara, l'indomptable, l'inoubliable, la chieuse number one totalement dépourvue d'humour, la sublime qui tombait d'inanition pour rentrer dans un corset de 12 centimètres de diamètre, celle qui soulève un sourcil et tous les Beaux du Galant South s'entretuent... Cette idiote aime un fantôme, mais découvre (une fois, une seule fois) le plaisir dans les bras musclés de Rhett Butler... J'ai relu cent fois ce passage bien pudique qui a alimenté mes premiers émois humides... Quelle nana! "I'll go back to Tara"...
La deuxième est Claudine, l'héroïne des premiers romans de Colette. Impertinente, curieuse, intelligente, fantaisiste, amoureuse, drôle, gourmande ... L'inverse de Scarlett! Je vous assure, lisez ou relisez "Claudine à l'école", je crois que ça n'a pas pris une ride!
Bien vite j'ai lu tout Colette qui reste un de mes écrivains de chevet. C'est avec "L'ingénue libertine" que j'ai commencé ce blog
Et bien vite, au-delà de ses écrits remarquables, c'est Colette elle-même qui est entrée dans mon panthéon. Loin de la vieille dame à la drôle de tête qui ne sortait plus de son appartement du Palais Royal, j'ai découvert une femme libre, drôle et mélancolique comme ses héroïnes, bisexuelle assumée, dont le minois et le corps de chat avaient dansé dans les cabarets... Et toujours l'écriture.
Et puis, la musique est arrivée. A 15 ans, une amie du lycée m'a fait découvrir Ike and Tina Turner. Surtout elle. "Proud Mary " continue depuis lors de me couper le souffle. Je l'écoute encore et encore... Et la vie de Tina. Isn't she a warrior ? She's da best! 
Catherine Ringer. Depuis le début, son répertoire, sa voix, son émotion, sa renaissance.  On a presque le même âge.
Et puis mes mamies.
Et puis quelques autres...
C'est la liberté qui est mon héroïne je crois. La liberté, celle qui te permet d'être qui tu es, comme tu es, proche de toi et proche des autres. Celle qui te donne la force. Il va falloir que je commence à m'y faire.

C'est incroyable comme j'ai envie de faire l'amour ce soir...










samedi 23 août 2014

Une riche vie intérieure


Tu te retrouves aux urgences, toi avec ta cheville qui a quadruplé de volume, le jeune homme qui a pris un surf dans le crâne, la fille qui faisait du vélo et s’est explosé le coude, l’autre nana qui a un genoux comme une pastèque… Tu as mal, tu attends, tu passes de l’infirmière à la toubib, on t’envoie faire une radio, tu attends, tu clopines à nouveau dans les couloirs interminables, tu as soif, tu ne peux pas fumer, tu croises une obèse en fauteuil roulant à qui il manque une jambe,  tu avises un vieil homme allongé sur un brancard, posé là, perclus de perfs, avec de l’oxygène dans le nez, qui tente dans un effort désespéré de remonter sa couverture parce qu’il a froid. Tu clopines pour aller la lui remonter. Il te remercie dans un souffle.  Tu continues le circuit et tu ressors cinq heures plus tard avec une belle photo en noir et blanc de ta fracture et ton plâtre… Les gens sont très gentils et c’est gratuit.

Tu es là, la jambe blanche, les orteils qui dépassent. Tu es venue chez tes amis voire l’Océan et tu t’es cassé la gueule dans un trou de sable dans la forêt de pins, parce que tu as voulu aller faire un petit jogging un jour de bruine.
Tu sens une immense vague de blues t’envahir. P… ! Tu es seule, l’autre est aux abonnés absents, tu es venue avec ta caisse en prenant de gentils covoitureurs sur Blablacar, comment vas-tu rentrer ? Et cet entretien pour une mission dans cette collectivité de la Côte d’Azur à 200 bornes de chez toi la semaine prochaine ? Jurons divers et variés, sanglots, reine des pommes, mais quand la poisse va-t-elle s’arrêter ? 

Et puis Lo est là, elle te rassure, on trouve des solutions pour tout. Tu rentres à Marseille. Quelqu’un conduit ta voiture. Ca arrange tout le monde. Bon plan.
Et ta fille chérie est là, elle te rassure, elle fait les courses, te remonte le moral.
Et elle te trouve une copine qui t’amène en voiture pour ce fameux entretien à 200 bornes. Y aller en béquilles, c’est un signe de motivation évident non ? 

Alors maintenant, tout est à peu près en place, reste plus qu’à patienter. Entre 30 et 45 jours de plâtre, c’est écrit sur le papier à en-tête de l’hôpital. Au mieux (et si 30 jours) encore trois semaines.
Mais ta fille va bientôt repartir vers de nouvelles aventures, l’autre est toujours aux abonnés absents, il ne sait rien de tout cela, (bon, allez, sois raisonnable et dis-toi bien que c’est fini, même si ça fait mal…), l’ex est en vacances avec sa nouvelle loute, et de toutes façons il vit loin, les copains ont du lait sur le feu (normal, z’ont pas que toi à s’occuper) et si l’un(e)  ou l’autre passe prendre le thé, c’est déjà pas mal.
Ta rentrée est repoussée d’autant, pas d’inscription avec le chouette partenaire que tu avais trouvé pour le cours de tango que tu guignais, pas de travaux dans la maison, ça va attendre, renouer avec ta vie sociale aussi. Reste quelques CV à envoyer… Des bouquins à lire, tu découvres Léonardo Padura et tu en es ravie, tu lis en vrac polars, romans (Jonathan Coe « Expo ‘58 », délicieux), tout ce retard que tu avais, et puis  Mad Men, Dowtown Abbey, Treme (tu te retiens pour ne pas y passer tes nuits),  Arte+7, l’écriture…  

Reste une riche vie intérieure…

vendredi 1 août 2014

La vie, l'amour, les coquillettes, le musette et la bière...

Plus de quatre ans que nous nous sommes rencontrés avec M... Sur un site libertin. Notre première rencontre fut mémorable. Par un soir de mars 2010, une pluie battante, perdue pour trouver l'endroit de rendez-vous dans cette zone commerciale noire et trempée, ronds-points et enseigne lumineuses criardes...
Je finis par trouver. Je l'attends les yeux bandés, le coeur battant... Une première pour moi...
Je découvre sa peau, son souffle, ses mains... Puis son visage quand il enlève mon bandeau...Très joli souvenir.
Je me découvre. 
Clandestine - il est marié et moi aussi - la relation prend de plus en plus de place. On prend des risques...
Et puis on s'attache...
Et puis le temps passe...
Il quitte sa femme en septembre 2012. C'est dur, brutal, violent. Elle est psychologiquement malade, très dépressive, voire bipolaire, internée à plusieurs reprises, physiquement très fragile... Mais il n'en peut plus de cette vie commune de plus de vingt ans. Notre relation est un catalyseur. Il lui reste fidèle en ce sens qu'il est auprès d'elle, qu'il paye, au sens propre et au sens figuré. Elle connait mon existence, sa haine se focalise sur moi. Elle me traite publiquement de noms odieux. Elle tente de monter tous leurs amis, leur fille contre lui... Banalité parait-il dans tant de séparations...  Elle fait irruption deux fois, une furie qu'il a peine à contenir (physiquement) sur le parking de la maison où elle pousse des hurlements, des éructations... J'ai peur. Je suis choquée. Je crois qu'elle veut me tuer. Chantage, tentatives de suicide à répétition...
De mon côté, la vie change aussi.
Notre couple devient officiel.
Il finit l'été dernier, en 2013,  par rencontrer ma fille au cours d'un dîner, quelques uns de mes amis, on passe des vacances en bande de potes (no sex!) sur la Côte Atlantique. Je rencontre sa fille, jolie brunette du même âge que ma rejetone. Ca s'apaise doucement.  On habite à 150 bornes, mais on passe nos week-ends ensemble, alternativement rats des villes et rats des champs...
Et puis... J'ai des problèmes de boulot, il a (toujours) des problèmes avec sa femme, sa fille...
Cette dernière année, la relation s'enlise. On se voit essentiellement tous les deux. Pas vraiment de vie sociale commune, plus beaucoup d'excitation, des projets en berne.... On tourne en rond.
On baise moins, on ne baise plus...
Une forme de conjugalité s'installe...
Le 18 juin dernier (non non, pas d'allusion...), je lui envoie ça :

"Le temps qui m’est donné aujourd’hui me permet de réfléchir (un peu) à notre relation.
Qui est tombée, comme tu le faisais fort justement remarquer l’autre jour, dans une sorte de quotidien confortable (très) et un peu sans surprise…
Confortable comme un vieux jean un peu mou, celui qu’on met pour aller faire ses courses…
Confortable comme ces nuits où nous dormons côte à côte sans beaucoup nous toucher (je dors bien avec toi).
Confortable comme nos petites habitudes, apéro chez toi, verre au pub chez moi, course à pied, shopping ou balades (j’aime prendre l’apéro, courir, faire du shopping et me balader avec toi).
Confortable comme un métronome pour un apprenti pianiste qui répète son morceau…  
Nous avons tellement partagé nos histoires, nos problèmes, nos enfants… (j’aime partager avec toi).

Je crois pourtant qu’il commence à manquer ce piment à l’histoire qui en faisait le sel il n’y a pas (si) longtemps.
Je ne sais pas si c’est le temps qui passe, la vie qui se renouvelle peu (je dois dire que mon récurrent problème de boulot n’aide guère… ), la cinquantaine qui tape, la flemme, une forme de lassitude, la fatigue des semaines qui tombe sur les épaules le week-end, on se connait presque par cœur, on est en mode répétitif (mais comment faire autrement ? ), le confort donc…
J’ai toujours beaucoup de plaisir(s) à nos moments, et j’espère que toi aussi. Je  crois que toi aussi.
Et je sais à quel point tu m’es devenu important. Attentif, patient avec mes sautes d’humeur, mes cafards et mes peurs, aimant, rassurant, généreux…  

Mais ce minuscule caillou dans nos chaussures, qui gène un peu la marche. Oh ! Mais pas trop. Très peu même. On avance quand même… Sans enlever la chaussure.
J’aimerais retrouver dans nos yeux ce léger scintillement complice… Cette pupille un peu agrandie… J’aimerais retrouver nos jeux de mains, jeux de vilains… J’aimerais retrouver nos cœurs de Maître et de Soumise qui palpitent avant l’épreuve et le plaisir…
Je sais. C’est difficile peut-être. C’est du taf mental… Poser le vieux jean et enfiler le noir, le vinyle et le cuir… (Bon, surtout l’été… Fait chaud !).
J’ai bien quelques idées, pour s'obliger à rompre le confort. Comme quand on n’a pas envie d’aller courir… et qu’on y va quand même !
Et surtout, ne pas s’empêcher de ré-enfiler le vieux jean. Parce qu’il est indispensable dans la garde-robe…"

On en parle un peu de ce mail... On décide de prendre des vacances relax et coquines, de repartir au Cap...
On a envie de légèreté. 
Il y a trois semaines la nouvelle tombe : sa femme est atteinte d'un cancer. Elle a réussi... Elle s'est brouillée avec tout le monde y compris sa propre famille, elle n'a plus que lui... Elle le tient dans sa toile d'araignée de culpabilité, de chantage, de malaise... She's a poisonous Black Widow... 



Il y va comme un bon petit soldat, pour elle, dit-il,  et surtout pour leur fille (21 ans, un peu paumée, se cherche de petits boulots en petits boulots...). Il y va et suspend notre relation, me l'écrit, ne veut pas que je vive ça, veut me protéger, veut rencontrer des gens avec lesquels il parlera d'autre chose, m'écarte... Et se fabrique une fiche sur un site libertin, où il va régulièrement... Je le vois (sixième sens, j'ai pas cherché longtemps...). Peut-être que ce soir, "il parle d'autre chose...". Sauf que cette fiche date de 2011 et se termine par ces mots : "P.S: Je recherche également une charmante complice pour relation suivie". Il a toujours menti, par le passé (il me l'a dit) et aujourd'hui...
Et moi, je suis triste, jalouse sans doute (une saloperie la jalousie), je me rends compte qu'on a toujours été trois dans cette histoire, dans sa propre histoire plus complexe et tortueuse qu'il ne veut bien l'admettre... Est-il de ces hommes (nombreux semble-t-il??? J'ai pas de stats!) qui, lorsque la relation s'installe perdent le désir ? Ai-je tant vieilli en quatre ans ? Non, ça, je ne crois pas... Mais on est si prompte à se sentir déstabilisée...
CA ME FAIT CHIER! 
Bon. Voila. Je ne sais pas que rajouter. 
Je pars demain, seule, rejoindre une amie en Ardèche, puis, je file chez ma chère et tendre Lo revoir l'Océan. 
Je suis fatiguée de cette histoire. Et pourtant je tiens à lui. Tout cela est d'un banal...Putain! On devait partir aujourd'hui en vacances...