Mon "mec" se fait la malle, le travail me fuit, ma cheville lâche...
Je suis seule dans la ville, dans la vie (en fait ce n'est pas vrai du tout) mais j'avais ce sentiment insupportable de solitude, de ne plus rien contrôler (et ça c'est en partie vrai). Que ma vie m'échappait.
Quand j'étais petite, vers 4 ou 5 ans, j'avais un livre illustré qui racontait l'histoire d'un petit bonhomme qui était une fleur de pissenlit, cette boule duveteuse sur laquelle on s'amuse à souffler... Il arrivait des tas d'aventures à ce petit bonhomme. Il était si léger qu'il se laissait porter par le vent et se retrouvait en fâcheuse posture. Un nouveau coup de vent le sortait de là et le portait ailleurs. Je me souviens de cette image du minuscule héros qui atterrissait sur une feuille emportée par les eaux de la rivière. Il regardait le paysage défiler sur son fragile radeau...
J'ai eu, ces semaines, l'impression d'être ce petit personnage, accrochée à ma feuille d'arbre au fil de l'eau.
J'ai eu l'impression d'être cette fleur sur laquelle on souffle et qui n'est plus rien.
J'ai arrêté de pleurer. Parce qu'en réalité, ça se voit pas sur le blog, mais ça fait 15 jours que je pleure pour tout, pour rien et que je me demande si je ne suis pas en train de virer dépressive. Mais en fait non.
Depuis ce passage dans ma maison, je vais mieux et je re-pense.
Je pense à mes héroïnes.
Consciemment ou pas, depuis qu'on est tout petit, on a des héros, des héroïnes qui nous fabriquent un imaginaire intime de ce que l'on voudrait être, sur notre façon d'être au monde et de le percevoir.
Personnages réels ou de romans, de films, pop stars, oncle lointain ou cousine extraordinaire dont la vie libre en rupture avec les codes nous a fait rêver adolescent(e) et puis la vie avançant, ce sont d'autres destins qui nous inspirent.
Mes héroïnes sont toutes des femmes.
La première fut sans doute vers l'âge de 11 ans, Scarlett O'Hara, l'indomptable, l'inoubliable, la chieuse number one totalement dépourvue d'humour, la sublime qui tombait d'inanition pour rentrer dans un corset de 12 centimètres de diamètre, celle qui soulève un sourcil et tous les Beaux du Galant South s'entretuent... Cette idiote aime un fantôme, mais découvre (une fois, une seule fois) le plaisir dans les bras musclés de Rhett Butler... J'ai relu cent fois ce passage bien pudique qui a alimenté mes premiers émois humides... Quelle nana! "I'll go back to Tara"...
La deuxième est Claudine, l'héroïne des premiers romans de Colette. Impertinente, curieuse, intelligente, fantaisiste, amoureuse, drôle, gourmande ... L'inverse de Scarlett! Je vous assure, lisez ou relisez "Claudine à l'école", je crois que ça n'a pas pris une ride!
Bien vite j'ai lu tout Colette qui reste un de mes écrivains de chevet. C'est avec "L'ingénue libertine" que j'ai commencé ce blog .
Et bien vite, au-delà de ses écrits remarquables, c'est Colette elle-même qui est entrée dans mon panthéon. Loin de la vieille dame à la drôle de tête qui ne sortait plus de son appartement du Palais Royal, j'ai découvert une femme libre, drôle et mélancolique comme ses héroïnes, bisexuelle assumée, dont le minois et le corps de chat avaient dansé dans les cabarets... Et toujours l'écriture.
Et puis, la musique est arrivée. A 15 ans, une amie du lycée m'a fait découvrir Ike and Tina Turner. Surtout elle. "Proud Mary " continue depuis lors de me couper le souffle. Je l'écoute encore et encore... Et la vie de Tina. Isn't she a warrior ? She's da best!
Catherine Ringer. Depuis le début, son répertoire, sa voix, son émotion, sa renaissance. On a presque le même âge.
Et puis mes mamies.
Et puis quelques autres...
C'est la liberté qui est mon héroïne je crois. La liberté, celle qui te permet d'être qui tu es, comme tu es, proche de toi et proche des autres. Celle qui te donne la force. Il va falloir que je commence à m'y faire.
C'est incroyable comme j'ai envie de faire l'amour ce soir...