samedi 20 octobre 2012

Fifty shades of grey, ou : On n'est pas sortis de l'auberge!

A l'aune de trois heures de TGV back from Paris avant-hier, l'inévitable Relay propose l'inévitable bouquin qui fait la une de toute la presse. Comme je lis aussi sur le web les journaux anglo-saxons, j'avais eu vent du phénomène il y a quelques mois.
Coup de poker. 17 Euros pour voir... 40 millions d'exemplaires vendus (et moi, et moi, et moi...).
J'ai vu, j'ai lu... Vraiment pas de quoi fouetter une chatte, fut-elle en chaleur...
Une écriture banale, des poncifs, un environnement américain fantasmé, c'est Pretty Woman en moins drôle, mais en nettement plus chaud. Il est immensément riche, incroyablement jeune et beau et ténébreux, elle est étudiante, "nature" mais très très belle sous ses grands pulls et ses jeans, vierge (oui, vous avez bien lu, vierge)... Il la déflore merveilleusement, il est son dieu, son guide sur les routes obscures du désir (soupiiiir!) et du plaisir (soupiiiir!). Il vient la chercher en hélicoptère, lui offre une édition originale de Tess of the d'Ubervilles et un cabriolet (ben voyons!). Il l'attache avec sa cravate (de soie), lui donne une fessée, quelques coups de ceinture, elle jouiiiiiit. Elle le déteste, elle l'aime, il furent heureux et eurent beaucoup d'enfants... Ca fait 1500 pages en trilogie. J'oubliais... hétérosexualité monogame jalousement préservée. Ouf! Même si Mit Romney devient président étatsunien, l'essentiel est sauf! Youpee yaeh!
Ce qui m'interroge, c'est le succès de ces bouquins.
Les éditions Harlequin vendent silencieusement des centaines de milliers de livres et leur collection "Spicy" marche très bien...
Et puis avant, quand j'étais gamine, il y avait les romans photos.
C'est exactement la même chose.
C'est juste un poil plus cru, mais c'est l'époque qui veut ça. Les scènes érotiques valent ce qu'elles valent. Elle mouille, il bande quoi. Et c'est "épicé" des mystères du BDSM.  What else ? Ce qui est un peu fatigant, c'est qu'il l'appelle "bébé" à tout bout de champ... Traduction inane du "baby" courant outre-Atlantique. Mais je ne suis pas sûre que "mon chou" eut mieux fait l'affaire. Ce qui est mal écrit ne peut être bien traduit...
Les femmes sont toujours enfermées dans des clichés presque aussi vieillots que les pubs de l'excellent "Les pubs que vous ne verrez plus jamais" d'Anne Pastor ( bonjour Quadra !). Belles, intelligentes certes, mais pantelantes et dépendantes avant tout de L'Homme, seul détenteur de leur désir et de leur plaisir.
Sidérant succès de la médiocrité. Remarquez, Dan Brown m'est littéralement tombé des mains!
Bien sûr, je suis très jalouse de l'auteure de ce navrant navet car je me dis que j'aimerais bien, au prix d'un effort minime (écrire 1500 pages de descriptions tartignoles et d'humour de collégienne), gagner autant de fric. Je n'oserais pas écrire ça. Je n'y penserais même pas... Peut-être parce que j'aime trop Colette, les deux Marguerite, Georges et tant d'autres... Je ne serais jamais business woman. Encore raté!
A lire, chez Anne Bert, et aussi chez Jean-Louis Michel... Et sur le site de la RTBF

PS : merci à mes derniers commentateurs (et trices) sur mon dernier post. J'ai précisément un peu de mal à écrire ces temps. Je vous lis tous les jours, mais en silence...
PPS : J'aime vraiment les hommes hein! Les femmes aussi du reste... même celles qui lisent des romans photos...
PPPS : Et j'adooooore être attachée et pantelante...