dimanche 24 février 2013

Le corps du cirque

Hier soir, je suis allée avec mon amie N. voir "Pulsions", spectacle de la 24ème promotion de l'Ecole Nationale de Cirque de Châlons.
Temps glacial, mistral noir et insensible à nos trépignements en attendant que s'ouvre le chapiteau.
Et quand ça commence... Emotion intacte, presque religieuse devant cette énergie sauvage, brute, cette force pure, fluide et contrôlée, cette étrange sensualité brutale.
Ces jeunes gens traversent nos corps, ils ont tout compris des rapports entre les hommes et les femmes, la domination, la soumission, les renversements sidérants, les genres qui se mélangent, superbe duo de femmes au trapèze fixe, sensuel et dangereux, et ce grand travesti en perruque blonde et hauts talons rouges, au torse d'acier qui enroule sur ses bras les sangles de son envol.
La musique douce et dure, rock et ballades, le décor en forme de tour de Babel, qui enferme et libère dans son cercle de gaze blanche sur laquelle sont projetés Jérôme Bosh et Pieter Bruegel ajoutent à l'intensité.

J'ai toujours été fascinée par les corps circassiens. J'ai eu la chance de côtoyer professionnellement des artistes que j'ai vu répéter, suer, travailler comme des esclaves bienheureux, que j'ai vu souffrir, se blesser, recommencer encore et encore.
La première fois que j'ai vu un numéro de cordes volantes, j'ai cru que mon coeur de battre allait s'arrêter. Chaque fois que les trapézistes s'élancent, que s'envole la bascule coréenne, que glisse le mât chinois, ça cogne dans ma poitrine.
La beauté de ces corps, lisses et félins, muscles dessinés, genoux emmaillotés, poignets bandés, cheveux fous, maîtrise du regard...
La folie et la sagesse.
Comme du sexe brut et comme un infini savoir, le calme face au danger et le plaisir au bout.



lundi 18 février 2013

Savoir être légère.

Soirée d'hiver dans un pub bruyant, joyeux et qui eut été enfumé ne serait la loi l'interdisant. Un groupe local joue avec un peu de lourdeur, mais dans la bonne humeur, des standards de rock et de pop.
Irish coffee corsé, discussion animée.
Ca tourne autour de nos souvenirs sexuels les plus marquants, les plus excitants, les impérissables, les inusables, ceux qu'on appelle à la rescousse quand le reste fout le camp.
Surprises, coups en douce, endroits insolites, purs shoots d'adrénaline. Moments troubles, inachevés, éphémères ou prémices...
M me raconte cette fois, au cours d'un dîner entre collègues, avec les époux et épouses des uns et des autres. Sa compagne est là aussi.
Il est assis à côté de la femme du chargé de clientèle pro, un bon copain.
Très vite, leurs genoux, leurs pieds, leurs jambes se frôlent, très vite sa jambe à elle sur sa cuisse à lui.
Très vite, tout en mangeant, en conversant, sa main à lui qui remonte le long de sa jambe à elle, va plus loin, plus haut.
Son cerveau est double. Il parle, plaisante, lève son verre à la santé d'untel, et il bande, il bande, il en a mal aux couilles. 
Elle se lève, va aux toilettes, revient. Le manège recommence de plus belle. Elle a enlevé sa culotte. Ses doigts la fouillent. Elle est trempée. Il sent l'odeur de son sexe et se demande comment nul ne s'en aperçoit... Elle laisse l'empreinte de son émoi sur ses doigts, sur la chaise...
Après le café, il n'ose pas se lever tant son sexe tend son pantalon.
Il se force à penser à autre chose, aux résultats de la boite, à la mort de Louis XVI, aux embarras de la circulation...
Il se calme. Il se lève.
Tout le monde se sépare.
Ils montent à quatre dans la voiture du mari de la dame.
Sa compagne à l'avant et lui à l'arrière avec l'épouse.
Il l'a branlée dans la nuit, tout au long du trajet.
La suite est plus banale. Elle est devenue pour quelques mois une de ses plus délicieuses maîtresses. 
Le temps du récit, le bruit, la musique, le pub se sont éloignés. J'étais à table, dans la voiture...
Ensuite, ce fut mon tour de relater un de mes shoots d'adrénaline.
Sans doute vous le raconterai-je? 

PS : Le titre de ce post est bien sûr un clin d'oeil à Emma.
PPS : Ce n'est pas encore tout à fait le printemps, mais j'en ai marre de mes posts ouin ouin. Je change de braquet ?


jeudi 14 février 2013

Valentine's day

Il y a un an, le 14 février,  j'avais écris  ce texte.
Aujourd'hui, ni tout à fait le même, ni tout à fait un autre...
Celui-qui-m'accompagne-depuis-presque-toujours n'est plus à mes côtés.
Il est parti courir sur d'autres mers. Hardi marin! Vogue bien, pas trop loin s'il-te-plaît.
Envoie moi quelques signaux de fumée, quelques messages en morse, je t'aime encore et tu me manques,
violemment parfois, sourdement à d'autres moments, brefs et pleurants. 
M-depuis-deux-ans-déjà, hé bien cela fait trois ans maintenant...
Je t'aime aussi, différemment.
Tu t'es mué en compagnon, solide je crois, tranquille aussi.
J'ai de la chance.
Aujourd'hui, ici, il fait beau. Comme toujours en février, au bord de la Méditerranée, les premières fleurs rose tendre des amandiers forment leurs petits bouquets pâles le long des routes et des voies de chemin de fer, visions surprises, fugaces.
Plus loin à l'est, les mimosas explosent jaunes et poudreux.
L'eau des flaques est glacée dans les rues sans soleil, mais derrière les vitres, les joues s'empourprent.
Saint-Valentin, fuck it. 

lundi 4 février 2013

De la valeur des choses.

En me promenant avant-hier, je m'amusais à faire mentalement le calcul de ce que je portais sur le dos... je trouvais que ça faisait cher.
En commençant par le bas, je remonte :
Une paire de bottines. Achetées soldées 135 €, valeur affichée 350 €.
Un jean's de marque, valeur vénale il y a deux ans 120 €.
Un pull à 3 sous, acheté sur un marché il y a longtemps.
Une veste en cuir Agnès B. Pièce maîtresse de ma collection de fringues, ce petit blouson en agneau plongé (je me demande bien dans quoi on a fait plonger cette pauvre bête qui lui donne une si belle peau...) est mon dernier achat déraisonnable antes la fin de mon contrat. Acheté soldé 400 €, valeur affichée 850 €.
Un manteau acheté soldé il y a 3 ans, 400 €, valeur affichée 800 €.
J'ai aussi bien sûr une culotte (je n'en porte pas toujours... mais ne nous égarons pas),  un soutien gorge, des chaussettes, des gants, une écharpe ... Ca ne compte pas et mon propos n'est pas là... 
A l'état neuf et non soldé, le principal de ce que je porte vaudrait environ 2120 €. Si je vends tout ça sur Ebay, en admettant que quelqu'un en veuille, j'en tirerai, grâce à Agnès B, une centaine d'Euros tout au plus... En fait, ça ne vaut plus rien.
La batterie de mon Iphone 3GS, (deux ans et demi d'âge, valeur 500 €, acheté en juin 2010) après le vol du premier, est en rade.
Suis allé sur des forums "changer la batterie d'un Iphone"... La première greffe cardiaque du professeur Barnard en 1967 fut une promenade de santé à côté de l'opération qui consiste à délicatement ventouser la batterie de Monsieur Jobs... Tu jettes donc ton téléphone intelligent et l'opérateur t'en fournit obligeamment un neuf. Un 5 si possible, comme ça tu changes aussi toutes tes connexions, fils, casques, etc...

Je me suis dis avant-hier en me baladant que je ne savais plus la valeur des choses... La valeur de mon travail. Je suis très bonne dans ma spécialité et j'ai même connu quelques heures de gloire... Quand j'avais 35/40 ans... Jusqu'à 45 ans à peu près, je valais. Tout d'un coup, à l'aune d'un accident de parcours professionnel, à la cinquantaine, je ne vaux plus rien... C'est curieux non ?

Je crois que je suis suffisamment active et vive pour finir par retrouver une activité professionnelle. Mais je ne retrouverai jamais le salaire que j'avais. Et qui me permettait de me payer des Iphone à 500 balles et des vestes en agneau plongé sans sourciller. Mon "train de vie" a déjà, depuis un an, diminué de moitié.

Je me pose de façon philosophique et réelle la question de la décroissance. De ma propre décroissance, en tâchant de ne pas y voir une quelconque déchéance mais plutôt une autre façon de vivre. Quelque chose d'optimiste. Quelque chose de joyeux. Quelque chose qui va m'aider à changer aussi dedans... Tu le vois là, le léger halo autour de ma tête, l'auréole qui commence à me pousser ?
Juste vivre autrement, se dire que c'est bien, que ce n'est pas une très dure contrainte imposée par cette putain de société en crise... Et mes ailes? Tu les vois pousser mes ailes?

Alors, quand vraiment je pète un câble parce que je reçois le énième refus poli ( Chère Madame, vous êtes si formidable, mais...) à un énième CV envoyé en me disant d'une toute petite voix "on sait jamais...", je me dis que, pour l'instant et tant que ça dure , il n'y a qu'une consolation à l'attente du printemps : une bonne baise, car ça, ça coûte rien et ça vaut tout...